Au début
des années 1980, alors que les Américains réalisent
les premiers vols de Navette spatiale, les autorités chinoises annoncent
qu’elles se doteront de leur propre navette. Des photos montrent même
des pilotes s’entraînant dans un simulateur ressemblant fortement
au cockpit d’un orbiteur américain!
Pourtant, au
cours de cette décennie, la Chine ne lance que 17 satellites (tous
avec succès), ce qui est modeste par rapport aux 203 engins lancés
par les Américains et aux 1182 expédiés par les Soviétiques.
Parallèlement,
à cette époque, nous assistons à la naissance de l’industrie
du lancement commercial de satellites. À la suite des succès
commerciaux de la fusée européenne Ariane, plusieurs firmes
américaines se mettent à offrir leurs capacités de
lancement. C’est ensuite au tour des Soviétiques de faire de même,
puis des Chinois.
Ceux-ci décrochent
ainsi une demi-douzaine de contrats. Toutefois, l’entreprise tourne court
lorsqu’en janvier 1995 une fusée chinoise porteuse d’un satellite
commercial s’écrase quelques minutes après son décollage,
tuant six personnes et en blessant 127 autres. Le revers est d’autant plus
cinglant qu’il apparaît en direct à la télé
nationale. Du coup, c’est la fin de tous les contrats commerciaux pour
la Chine.
Prétentions et réalité
Voilà
qui n’empêche pas le gouvernement chinois d’aspirer à de plus
grandes réalisations, en annonçant son intention de se doter
de son propre vaisseau spatial habité. On est cependant loin d’un
grandiose projet de navette, puisque les Chinois optent pour la technologie
russe des Soyouz.
Ils achètent
en effet les plans des vénérables vaisseaux russes qui transportent
tous les cosmonautes depuis 1967. Bien sûr, les ingénieurs
chinois en profitent pour améliorer quelque peu le design des Soyouz.
Ils baptisent leur vaisseau Shenzou («vaisseau céleste»).
Dessin d'un vaisseau Shenzou en orbite
Un premier
Shenzou est lancé à vide en novembre 1999 pour un vol d’essai
de 21 heures. L’opération est couronnée de succès,
de sorte qu’on s’attend dès lors à ce qu'après deux
ou trois autres vols d’essai, une mission habitée suive d’ici une
année ou deux.
À titre
comparatif, au début des années 1960, les Soviétiques
n’ont mis que onze mois à passer du premier test de leur capsule
Vostok à l’envolée de Youri Gagarine. Côté américain,
il s’est écoulé une année et demie entre le premier
tir d’une cabine Mercury et le vol de John Glenn. De surcroît, à
l’époque, «tout était à faire», les Soviétiques
et les Américains ne sachant même pas si un être humain
pouvait survivre à quelques minutes d’apesanteur.
Par contre,
les Chinois bénéficient des quarante années d’expériences
acquises par les Russes et les Américains, en plus de disposer de
la technologie éprouvée des Soyouz. Pourtant, il leur faut
quatre
années pour satelliser l’un des leurs!
Ce premier
pas ayant été franchi avec succès, on s’attendrait
à ce que l’ambitieux programme chinois adopte maintenant une cadence
accélérée. (En 1961, les Soviétiques n’ont
laissé s’écouler que quatre mois avant de procéder
à un deuxième vol habité, alors que les Américains
n’en ont pris que trois.)
Or, aucun Chinois
ne s’est envolé en 2004 et on annonce le deuxième vol pour
le milieu de 2005. Une bonne vingtaine de mois s’écoulera donc entre
les deux premiers séjours de Chinois dans l’Espace. De surcroît,
il ne devrait s’agir que d’une mission de quelques jours réalisée
par deux hommes.
Voilà
qui paraît bien peu en regard des ambitions chinoises de s’installer
dans l’Espace et de conquérir la Lune… À ce rythme, il leur
faudra des décennies pour réaliser ce que les Américains
et les Russes ont accompli dès les années 1960. |