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Quand une dispute va-t-elle
trop loin ?
Vous
vous chicanez avec quelqu’un de votre entourage.
Vous
vous disputez de plus en plus souvent et la tension monte à tel
point que vous ne savez plus quoi faire. Au début, vous pensiez
qu’il ne s’agissait que d’une mésentente, mais voilà que
ça semble devenir une «guerre à finir»…
Votre
chicane est-elle rendue trop loin? Où se situe la limite entre
une dispute raisonnable et une confrontation qui va trop loin?
Pas
facile à dire, n’est-ce pas?
Fort
heureusement, il est relativement facile de déterminer la
frontière entre une dispute normale et une confrontation déraisonnable.
Il
s’agit de savoir si on a affaire à deux personnes qui désirent
en venir à une entente ou s’il s’agit plutôt d’un cas ou l’un
cherche à s’imposer, à gagner à tout prix sur
l’autre.
Dans
le premier cas, on a affaire à un conflit alors que dans le second,
c’est plutôt un rapport de force.
Conflits de valeur et chicanes
de voisin
Disons
d’abord qu’il est normal de vivre de temps à autres des conflits.
Ce peut être une mésentente avec un collègue de travail
ou avec un membre de sa famille, sinon même avec son conjoint ou
l’un de ses enfants.
Évidemment,
on peut espérer ne pas être trop souvent en conflit mais,
d’un autre côté, il faut se dire qu'il y a parfois des situations
où on est en désaccord avec quelqu’un de notre entourage.
Ce peut être une question de point de vue divergeant, ce qui arrive
de temps à autre entre collègues de travail. Ou ce
peut être des attentes différentes, par exemple, dans un couple
au moment d’un achat ou de décider ce que seront les prochaines
vacances. Il peut s’agir d’un conflit de valeur sur l’organisation
de la vie en famille avec son ado. Etc.
Il
faut alors en discuter, ce qui n’est pas toujours facile puisque cela peut
aisément susciter une confrontation. Mais toute confrontation
- des idées, des points de vue, des besoins, des attentes, etc.
- fait partie de la vie.
Imaginons
un cas classique: une chicane entre voisins.
Disons
que l’un des arbres sur votre terrain porte un peu trop ombrage au potager
de votre voisin. De plus, les feuilles, les samares et les brindilles
qui tombent parfois de votre arbre l’incommodent de plus en plus.
Dans
un premier temps, votre voisin vous a demandé de tailler votre arbre
de façon à remédier à la situation. Mais
voilà que vous recevez une mise en demeure vous ordonnant d’abattre
l’arbre.
Il y a une différence énorme entre être en conflit
avec quelqu’un et subir ce qu’on appelle un rapport de force.
Dans
le cas d’un conflit entre voisins, l’un comme l’autre tentera de chercher
une solution. Bien sûr, vous pourriez tailler l’arbre de façon
à limiter les dégâts qu'il provoque chez le voisin.
Vous pourriez aussi envisager l’installation d’une barrière pour
contenir ce qui tombe de l’arbre… à moins que votre voisin déplace
(ou réaménage) légèrement son potager.
En outre, celui-ci pourrait faire preuve d’une certaine tolérance
alors que, de votre côté, vous prendriez soin de limiter le
plus possibles les inconvénients générés par
votre arbre... Après tout, le fait de vivre en société
nécessite certains aménagements alors qu’entre gens raisonnables,
il est sûrement possible de s’entendre.
Toutefois,
il s’en faut souvent de peu pour qu’un conflit dégénère
en «lutte à finir» où l’un tente d’imposer sa
volonté à l’autre. Dans le cas de l’arbre, il pourrait
être tentant que l’un ou l’autre en vienne à se butter: ou
l’arbre demeurera tel quel ou il devra être coupé. C’est l’un
ou c’est l’autre!
Voilà
qu’on tombe dans un rapport de force - qui imposera son point de vue, qui
gagnera? – comme cela arrive trop souvent entre voisins.
Rapport de force et conflit
On
appelle rapport de force un rapport dans lequel les deux
individus sont de pouvoirs équivalents mais où l’un cherche
à contraindre l’autre.
Ainsi,
dans notre exemple, ni l’un ni l’autre n’est en mesure d’imposer quoi que
ce soit à l’autre. Par contre, à la suite de la mise
en demeure, votre voisin désire voir disparaître l’arbre.
Et puisqu’il n’a pas autorité sur vous, il utilise un moyen contraignant
pour obtenir gain de cause.
Il
a alors recours à l’intimidation et aux menaces – des formes insidieuses
de violence – pour vous faire peur ou, du moins, pour que vous vous sentiez
suffisamment dérangé pour finir par céder. («OK,
d’accord, je vais couper mon arbre…») Ce n’est donc pas un
conflit ni une chicane, même si cela peut, dans certains cas, en
avoir les apparences.
Un
rapport de force est stratégique. Celui qui l’exerce
a l’intention de gagner sur l’autre afin de satisfaire à tout prix
son désir. À cette fin, il utilisera des moyens contraignant:
menaces (mise en demeure), intimidation («Si tu ne coupes pas ton
arbre, tu vas avoir affaire à moi!»), sinon même à
des gestes de violence (voilés ou concrèts).
Il
peut même s’agir de moyens qui ne paraissent pas violents, de touts
petits gestes qui, pris individuellement, semblent anodins mais qui ont
le même but: dénigrer l’autre, l’embêter ou lui faire
suffisamment peur pour qu’il se conforme à ses désirs, etc.
Qu’on ne s’y trompe pas, ce sont là des stratégies et non
pas simplement le défoulement d’une frustration ou d’une agressivité.
Quant
à celui qui subit ce rapport de force, il n’a rien à gagner,
si ce n’est que de retrouver sa paix.
Par
contre, dans le cas d’un conflit, nul ne recourt à
la violence pour imposer sa volonté. (il peut cependant y avoir
parfois une certaine agressivité.)
Les
spécialistes définissent le conflit comme étant :
«la collision qui risque de survenir lorsque l’action d’une personne
empêche, nuit ou interfère avec l’action d’une autre personne».
Plus précisément, un conflit surgit «lorsque le comportement
d’une personne interfère avec les besoins d’une autre ou que leurs
valeurs s’opposent».
Par
exemple, il pourrait s’agir des tensions qui se vivent entre conjoints
sur la question du budget. Il y a entre eux une «collision
de valeurs» dans certaines situations liées aux dépenses.
Ces «prises de bec» ne constituent pas un rapport de force
tant et aussi longtemps qu’il n’y a pas de stratégie violente de
la part de l’un envers l’autre pour «gagner». Par contre,
si le conflit persistait, il peut dégénérer et finir
par donner lieu à un rapport de force.
Ainsi,
le harcèlement, les menaces, le dénigrement sont tous des
formes de violence inscrites dans un rapport de force, tandis que des tensions,
des différends et des chicanes appartiennent davantage au monde
des conflits.
Comme
les conflits font partie de la vie, on ne peut pas les prévenir,
mais on peut les résoudre. Il existe diverses techniques pour
y parvenir, dont l’écoute active, l’explication, le compromis, la
négociation, l’excuse, la résolution de problème sans
perdant, la médiation, etc.
Il
en est tout autrement des rapports de force qui, eux, ne font pas partie
du processus normal de la vie. Surtout, on ne doit pas chercher à
les résoudre de la même façon qu’on le fait avec les
conflits, car confondre l’un et l’autre provoque nécessairement
des interventions inappropriées et inefficaces, ce qui peut même
avoir des conséquences dangereuses.
Des
conséquence dangereuses? Eh bien oui!
De
fait, tout rapport de force fait nécessairement une victime: par
exemple vous, qui n’avez rien fait (sinon que de laisser pousser un arbre).
Vous vous retrouvez soudainement victime d’une «attaque» de
la part d’un voisin (qui menace de vous poursuivre, à moins qu’il
ne vous menace physiquement).
Or, cette notion de «victime» est fondamentale, car si on tente
d’imposer une médiation, l’agresseur en profitera pour ensuite gagner
un peu plus de pouvoir sur sa victime.
Une seule façon de
résoudre un rapport de force
Si
un conflit peut être résolu par négociation ou par
médiation, cela est impossible dans le cas d’un rapport de force
(puisque l’une des deux partie cherche à tout prix à gagner
sur l’autre).
La
seule façon de mettre un terme à un rapport de force c’est
par l’intervention d’une autorité – de quelqu’un qui peut exercer
un pouvoir sur celui qui impose le rapport de force. Selon le cas,
ce peut être un patron, un policier, un juge, etc.
Seule une autorité peut mettre fin à un rapport de force
exercé par un individu en imposant fermement l'arrêt des hostilités.
Évidemment,
un condition préalable est nécessaire pour qu’une autorité
s’impose: il faut que celle-ci soit consciente de la notion de rapport
de force… ce qui est malheureusement pas très fréquent. |
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