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Ce qui caractérise l’activité
spatiale de mars 1957, c’est le secret. En apparence, il se passe peu de
choses, si ce n’est que l’Armée de terre américaine effectue
trois tirs de son missile Jupiter, d’une portée de quelques centaines
de kilomètres.
Personne ne se doute alors que ce sera finalement
ce type de missile qui lancera le premier satellite américain. Pour
l’heure, l’équipe de Wernher von Braun met au point les Jupiter
dans le but d’en équiper les bases américaines en Europe
(que dénoncent tant les Soviétiques).
Des cosmonautes chiens ?
Côté soviétique, le premier
missile R-7 est livré en secret au centre de tir ultrasecret du
Kazakhstan. À ce stade de l‘histoire, personne en Occident — sauf
quelques rares spécialistes du renseignement — ne connaît
l’existence du R-7 et de sa base de tir. Or, il s’agit du fameux cosmodrome
de Baïkonour, dont la construction a débuté en 1955
et dont on apprendra l’existence que dans plusieurs années.
Par contre, les Soviétiques révèlent
qu’ils entraînent des chiens en prévision de vols spatiaux.
Ils nous présentent même l’un d’eux, Malyshka qui, disent-ils,
est déjà habitué aux «voyages dans l’espace».
En fait, ces dernières années, les Soviétiques placent
de temps à autre des chiens à bord de missiles et fusées-sonde.
En 1955, l’un d’eux a même atteint les 110 kilomètres d’altitude,
la capsule transportant l’animal ayant été récupérée
en fin de course à l’aide de parachutes. (Le 16 mai, un missile
transportera un chien jusqu’à 212 kilomètres d’altitude.)
Les Soviétiques font de la sorte voler
des chiens, dont Malyshka, qui s’habituent fort bien au «voyage dans
l’espace». Ils nous indiquent que, de retour sur Terre, ces chiens
mangent normalement et ne présentent aucun problème de santé.
(Évidemment, personne n’imagine que dans huit mois seulement, un
canin soviétique orbitera la Terre.) |
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En ce mois de mars, on apprend
que les Soiétiques se préparent déjà au jour
où ils enverront des chiens dans l’espace, alors que l'Armée
de l'air américaine planifie le lancement de sondes vers la
Lune. |
Wernher von Braun (1912-1977)
À
45 ans, Wernher von Braun dirige l’équipe d’ingénieurs qui,
pour le compte de l’Armée de terre, met au point l’un des premiers
missiles opérationnels, Jupiter, dont il tient une maquette. Bien
que travaillant pour les militaires, il est déjà célèbre
comme promoteur de l’exploration spatiale, ayant notamment collaboré
avec Walt Disney à la présentation de ce que l’avenir nous
réserve de merveilleux. (Plus dans Wikipédia) |
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Malyshka, le premier
chien cosmonaute présenté au public par les Soviétiques. |
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Autres projets militaires
Nous apprenons par ailleurs l’existence de
nouveaux projets militaires américains. L’hebdomadaire spécialisé
Missiles
and Rockets révèle que le Pentagone envisage expédier
des engins jusqu’à la Lune d’ici quelques années.
En quoi la Lune intéresse-t-elle les
militaires américains?, peut-on se demander. L’Armée de l’air
cherche avant tout à occuper le plus de territoire possible, allant
même jusqu’à planifier des bases lunaires.
À l’époque, la nouvelle du magazine
étonne, les Américains n’étant pas encore capables
de placer dix kilos en orbite terrestre. Toutefois, elle est fondée
puisque dans un an et demi, le Pentagone lancera bel et bien trois engins
vers la Lune.
Les militaires songent en outre à une
utilisation originale des satellites: détecter les tirs de missiles
et les explosions nucléaires depuis l’espace. De tels satellites,
dits d’alerte avancée, seront d’ailleurs lancés à
partir de 1960 dans le cadre du programme MIDAS (Missile Defense Alarm
System).
On voit donc une fois de plus que les forces
armées américaines se préparent activement à
utiliser l’espace. Tel n’est cependant pas le cas en Union soviétique,
où seuls quelques savants et ingénieurs civils rêvent
d’espace. Pour le moment, l’Armée rouge cherche surtout à
se doter de missiles nucléaires intercontinentaux.
Suite: Avril 1957: Tendances spatiales
Voir aussi: Mars
1957: Cloaked in Secrecy dans The
Great Adventure Project |
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